Vesper Ogden

Difficile d'imaginer, en considérant sa longue silhouette passer dans les couloirs du ministère, que l'enfance de Vesper ait pu être aussi austère. Atteinte alors qu'elle n'avait que trois ans d'une forme agressive de dragoncelle, le remède habituellement utilisé ne sembla pas aussi efficace qu'il l'était sur les adultes, si bien qu'elle passa des mois à Sainte-Mangouste, oscillant entre la vie et la mort. Et si les soins administrés par les médicomages finirent par remettre la fillette sur pieds, elle en garda cependant une santé très fragile – ses défenses immunitaires ayant été gravement endommagées par l'agressivité de la pathologie, selon les dires des soigneurs. À cause de cette déficience grave, la petite Vesper passa beaucoup de temps à faire des allers-retours à l'hôpital, ce qui retarda son admission à Poudlard d'une année. Ses parents, très inquiétés par l'état de santé de leur fille, refusaient en effet de la voir s'éloigner de leur tutelle, craignant qu'il ne lui arrive quelque chose alors qu'elle serait entre les murs de l'école Ecossaise. Il n'en fut cependant rien, et Vesper vécut son arrivée à Poudlard comme une libération, ainsi qu'une profonde émancipation vis-à-vis du rôle qu'elle avait dû endosser toutes ces années ; celui de la gamine frêle, fragilisée par une maladie inévitable.

Répartie à Gryffondor pour ses qualités d'acharnement et de courage, elle n'en resta pas pour autant de celles qui se distingua le plus auprès de ses professeurs, collectant des notes excellentes dans quantité de matières. C'est qu'elle avait un truc à défendre, Vesper, quelque chose à prouver. Une capacité à être indépendante, peut-être. À réussir, sans s'appuyer sur la pitié. Et c'est là le danger avec les filles comme elles, qui paraissent aussi frêles ; du haut de leur petite taille, il paraît que ce sont celles qui hésitent le moins à mordre, afin de vous montrer qu'elles existent, et qu'elles n'ont pas besoin de vous. D'ailleurs, n'espérez sûrement pas qu'elle vous parle de sa maladie, car personne n'a jamais été mis au courant – exceptés ses parents. C'est qu'elle a la pitié en horreur. Parler de ses faiblesses ? Une terrible erreur. Surtout lorsque, comme elle, on se destine à une carrière dans le droit sorcier, où vous pouvez vous retrouver écrasés à la moindre faille, au moindre faux pas. Elle est intelligente, Vesper, alors elle n'a rien dit pendant toutes ses années ; et force est de constater que la chose lui a réussi, parce qu'elle est devenue la plus jeune avocate du Magenmagot, à seulement vingt-deux ans. Au ministère, elle se construit une réputation de femme hyperactive à la loyauté inflexible, et incorruptible. Travaillant avec Amadeus Potter, elle soupçonne d'ailleurs celui-ci d'entretenir des relations douteuses avec certaines organisations extérieures au ministère, et s'est jurée d'en découvrir plus. D'autant plus qu'on lui a récemment annoncé qu'elle n'avait plus rien à perdre, Vesper. Cette fragilité immunitaire, ce corps de cristal, vous vous rappelez ? Il semblerait que ce soit en épée de Damoclès, qu'il se soit transformé, et qu'elle n'ait jamais été aussi proche de trépasser. Sauf que quitte à se savoir condamnée, la jeune Ogden préfère réaliser tout ce que la certitude d'une longue vie l'empêcherait de faire. Prendre des risques sûrement, comme par exemple en intégrant le groupe des Sceptiques, dirigé par Freyr.
Construire un monde meilleur, évidemment.