Onoria Bonham

Onoria est de celles qu'on ne peut louper. De sa prestance, elle éblouie ses parents à peine son premier hurlement passé. C'est qu'elle en impose, la douce enfant, avec ses sourires constants et son envie de se surpasser. Elle marche avant les autres, elle parle quand d'autres se contentent de gazouiller ou de tenter quelques mots bafouillés, tout du moins c'est ce que ses géniteurs prétendent. Peut-être que dans le fond, elle est exactement comme les autres, mais comprenez, lorsqu'on porte le nom d'un célèbre guérisseur, on se doit de prétendre que l'on est supérieur à la norme, même si cela frôle souvent le ridicule. C'est un fardeau que l'on s'efforce de porter ou que l'on tente d'afficher pour prétendre que l'on vient d'une puissante lignée. Pourtant, à plus y creuser, on peut se permettre d'en douter, car même s'ils descendent du guérisseur, il ne faut pas oublier quelques tares qui viennent s'infiltrer dans leur arbre généalogique. Quelques cracmols, moldus, assassins ou fous. Il n'y a rien de bien prestigieux une fois le nom passé.

Ça, Onoria l'a très vite compris, aussi rapidement qu'elle s'est lassée des désirs de ses parents, de la voir être au-dessus de la norme. Peut-être parce qu'elle se satisfait à être comme les autres et que dans le fond, elle ne supporte pas cette idée commune d'évoquer une quelconque futile supériorité. La prétention de ses ancêtres, elle l'a remplacée par une capacité à se sous-estimer. Elle se dit banale, souvent incapable. Elle se dit douce quand elle possède en elle le feu des plus puissants volcans. Elle se dit invisible quand elle parvient à attirer sur elle les regards. Et dans le fond, elle s'en moque. L'avis des autres n'est qu'un coup de vent sur sa peau, qu'elle laisse passer pour ne pas avoir à s'en soucier. Elle se contente de vivre et de profiter de sa vie d'adolescente. Pourtant, autour d'elle, à Poudlard, elle voit bien ce monde idéal qui s'écroule. La jeune Onoria qui rêvait d'une existence paisible est plongée dans la noirceur lorsque ses parents sont retrouvés assassinés, alors qu'elle n'est âgée que de quatorze ans. Il paraît que c'est à cause de leur sang, pas assez pur, et de leur prétention, il paraît qu'ils ont contrarié les mauvaises personnes, il paraît que l'on ne connaît pas la véritable cause de cet assassinat. Il paraît qu'elle ne sait rien, si ce n'est qu'elle doit apprendre à vivre sans rien.

Loin de se laisser abattre, Onoria met de côté ses sentiments, elle les étouffe sous une couche de prétention. C'est dans ses batailles qu'elle met tout son cœur, contre ceux qui osent élever la voix contre elle ou contre les plus faibles. Elle se dit qu'à défaut d'avoir une famille, elle peut toujours s'en fonder une entre les murs de l'école. C'est dans cette optique qu'elle rejoint les médiateurs, bien que silencieuse durant les premières réunions, elle devient bien vite un des membres les plus actifs du groupe, proposant mille et une action pour clouer le bec des serpents et leur faire payer leur insolence. Incapable de garder le silence, elle dévoile un caractère des plus explosifs, au grand damne des professeurs qui peinent à choisir entre la colère ou la pitié. C'est que, pas une seule fois, ils ne l'ont vue pleurer, alors ils se disent qu'en elle, c'est un tremblement de terre qui va tout ravager, à la première grande contrariété. Mais à quoi bon s'en soucier, se dit-elle ? Au-dessus de ses épaules, ne pèse plus la pression de se surpasser, au-dessus d'elle ne pèse plus rien, si ce n'est un sentiment étrange de ne plus exister.