Gideon Lovegood

C'est dans un manoir au sud de Londres que naissent Sirius et Gideon Lovegood.
Jumeaux, ils se distinguent pourtant dès leur première apparition : quand Gideon semble éveillé et ressemble en tout point à ses aînés, Sirius peine à trouver sa respiration. Il est le chiot abîmé de la porté, celui dont ses parents préféreraient se débarrasser plutôt que de devoir le dévoiler aux yeux du monde. Pourtant, ils n'en font rien, lorsqu'ils comprennent que cette condition peut leur apporter la pitié de leurs pairs et les faire bénéficier d'une générosité nouvelle, basée sur les fausses bonnes consciences des parents soulagés de ne pas être à leur place. Les Lovegood affichent alors ce bébé maladroit, avec ses jambes qui ne bougent pas et ses yeux perdus. Celui qui souffre mais qui ne pleure pas.

Mais dès la naissance du dernier de leurs fils, Sirius devient une chose à mettre de côté, lui, ses cheveux trop sombres et son visage transparent. Ils le relèguent au fond, ils le maintiennent dans sa chambre et préfèrent mettre en avant les autres héritiers, dont Gideon en est le parfait portrait. Car le petit garçon est plein d'entrain, il n'a jamais peur de se blesser, il respire la vie et la bonne santé. On le dévoile aux sang-pur avec l'idée d'en obtenir un bon mariage et de l'élever sur le devant de la scène en compagnie des Lovegood acceptables. Tout se déroule à la perfection, jusqu'au jour où un drame vient briser la vie de Gideon. Le petit garçon princier se voit abattu quand il découvre le corps sans vie de son frère. S'il ne se souvient pas du drame, ni de l'instant où il l'a tué, il voit, dans les yeux de ses parents, qu'il est l'unique responsable. Qu'importe s'il existe dans son esprit un grand vide impossible à combler. Ce cruel événement crée en lui un sentiment déchirant. Il ressent de la culpabilité, mais aussi de la souffrance et de la tristesse pour ce jumeau qu'il n'a jamais pu connaître.

Les vagues souvenirs aux allures indistinctes qui se bousculent dans son esprit le terrifient, alors il préfère ne pas réfléchir et faire ce qu'on lui dit. Lorsqu'il entre à Serdaigle et que ses parents exigent de lui qu'il soit un élève parfait, car le fils du milieu doit être l'esprit, c'est ce qu'il devient. Son existence est une feuille blanche que ses parents comblent selon leur volonté. L'enfant parfaitement modelé le reste durant un temps, jusqu'à ce que sa colère remplace ses absences. Dans son cœur, une haine s'insinue et le persuade que nul être ne mérite d'exister autour de lui, encore moins ceux qui ont laissé son frère périr.

Le monde doré qui l'entoure devient une prison, une cage qui l'oppresse et le sourire de ses geôliers éveille des envies de violence qui le poussent à en détruire les barreaux. C'est dans la brutalité et dans l'insolence qu'il devient roi. Il le fait pour ruiner le monde et son nom de famille. S'il se pense plus malin, c'est pourtant le déshonneur qui le frappe, le jour où il frappe son père en pleine réception. On le considère soudainement comme un garçon malade, on le plaint quand on le croise car il a certainement hérité des tares de son frère. L'homme est renié, mis à l'écart, on oublie son nom sur les invitations, on en oublie son existence, tout du moins on prétend le faire pour ne plus entendre ses mots grossiers.

Gideon est exilé, il est envoyé en Sibérie pour qu'il puisse retrouver ses esprits. Si ses parents le font dans l'espoir de le briser, de ramener l'enfant manipulable qu'il était à la raison, les choses sont différentes. Dans les plaines verglacées, Gideon apprend à être lui-même. Il se lie d'amitié avec des hommes qui lui font découvrir un nouveau monde, loin de l'univers uniformisé que l'on a tenté de lui faire accepter. S'il existe dans leurs actions une certaine illégalité, il y voit aussi la possibilité de se détacher de l'étreinte parentale. Sa colère parvient à s'apaiser, il la ressent toujours mais il apprend à la canaliser et à réfléchir avant d'agir pour que sa vengeance soit plus sombre encore.

L'ancien serdaigle prend un certain plaisir à tester ses propres limites, et en tire également des notions en magies du monde et surtout dans les magies les plus sombres. Connaissances qu'il met au service du ministère quand il rejoint le département des mystères après être revenu, la bouche en cœur et des mensonges dansant sur sa langue. Mais cela ne lui suffit pas et lorsque Freyr vient à être mis au courant de ses découvertes sur les différentes magies noires qui peuvent exister, il lui propose alors de rejoindre son mouvement et Gideon accepte.

Si Gideon doute, durant un temps, du bien fondé de ses actions, il finit par se convaincre qu'il peut enfin aider à changer le monde. Qu'importe si, pour cela, il doit trahir le ministère et ses convictions. L'ancien serdaigle use des critères de sa maison, sa capacité d'adaptation, sa soif de connaissance et ses idées décalées qui le font flirter avec le danger pour trouver sa place dans l'organisation. Pourtant, malgré son envie de construire un monde meilleur, ses recherches sont placées sous le signe d'un certain égocentrisme. C'est que, depuis son exil en Sibérie et ses expériences, des pièces sont manquantes dans son esprit, des souvenirs étrangers surgissent dans sa mémoire, souvent des instants volés aux personnes dont il est proche. S'il ne peut les contrôler, il ressent la violence de ces moments comme s'il les vivait à l'instant. Gideon est prêt à tout pour retrouver un esprit normal, afin de vivre sans ressentir la souffrance des autres.
Sans avoir l'impression qu'il a vécu mille vies.